Madame le Ministre,
L’Euro 2012 s’est terminé depuis presque deux mois mais nous tenions à saluer la décision unanimement prise et respectée par tous les membres de nouveau gouvernement, concernant le boycott politique des matchs s’étant déroulés en Ukraine.
Selon leurs propres termes, « au regard du respect de leurs valeurs », les dirigeants politiques français et européens envoyaient un signal fort pour refuser la politique du régime ukrainien à l’égard des prisonniers d’opinion dont l'ex-première ministre Loulia Timochenko : Celle-ci, condamnée à sept ans de prison pour abus de pouvoir, puis accusée de détournement de fonds et d'évasion fiscale, persécutée, violentée et dont le seul moyen de protester a été une grève de la faim d’une vingtaine de jours.
Toutefois nous souhaitons vous transmettre notre préoccupation quant à votre silence et celui de vos confrères européens par rapport à une autre situation relativement comparable, si ce n’est pire
L’Euro 2012 s’est terminé depuis presque deux mois mais nous tenions à saluer la décision unanimement prise et respectée par tous les membres de nouveau gouvernement, concernant le boycott politique des matchs s’étant déroulés en Ukraine.
Selon leurs propres termes, « au regard du respect de leurs valeurs », les dirigeants politiques français et européens envoyaient un signal fort pour refuser la politique du régime ukrainien à l’égard des prisonniers d’opinion dont l'ex-première ministre Loulia Timochenko : Celle-ci, condamnée à sept ans de prison pour abus de pouvoir, puis accusée de détournement de fonds et d'évasion fiscale, persécutée, violentée et dont le seul moyen de protester a été une grève de la faim d’une vingtaine de jours.
Toutefois nous souhaitons vous transmettre notre préoccupation quant à votre silence et celui de vos confrères européens par rapport à une autre situation relativement comparable, si ce n’est pire
En 2013 est prévu le déroulement de la même compétition européenne, réservée celle-ci aux espoirs du ballon rond – les joueurs de moins de 21 ans - en Israël, dont les prisons ont récemment été ébranlées par un mouvement massif de désobéissance non-violente lancé en avril dernier: des milliers de prisonniers palestiniens se sont mis en grève de la faim durant près d’un mois afin d’obtenir leurs droits humains les plus élémentaires, longtemps déniés par les autorités israéliennes : visites des proches, accès à l’information, à l’éducation, amélioration des soins médicaux.
La cessation des pratiques cruelles - telles que l’isolement carcéral (enfermement, depuis une dizaine d’année pour certains prisonniers, dans une cellule de 6m2 sans aucune interaction humaine) et la détention administrative (mesure qui permet à Israël sous prétexte de sécurité d’arrêter tout palestinien sans inculpation officielle, ni présentation devant un quelconque organe judiciaire, ni raison fournie aux proches) dont les conditions d’application violent de façon flagrante le droit international - faisaient également partie des revendications principales.
Un accord historique a été trouvé le 14 mai entre les autorités pénitentiaires israéliennes et les représentants des prisonniers, mais quinze jours après, celui-ci était déjà maintes fois violé par Israël qui, dans les faits, a renouvelé la détention administrative de plus de 25 prisonniers, n’a pas cessé la pratique d’isolement carcéral et a multiplié les violences et les humiliations à l’égard des prisonniers. A l’heure où nous vous écrivons, le mouvement ne s’est pas arrêté et quatre détenus sont en grève de la faim : Samer Al-Barq, Hassan Safadi, Ayman Sharawna, Samer al-Issawi.
Contrairement à ce qui se passe en Ukraine, l’aspect sportif et même footballistique était foncièrement présent dans ce mouvement généralisé de grève de la faim dans la mesure où parmi ces prisonniers se trouvait une vedette du football palestinien, membre de la sélection nationale, Mahmoud Sarsak. Vivant dans le camp de réfugiés de Rafah au sud de la Bande de Gaza, alors qu’il s’apprêtait à rejoindre l’Equipe de Palestine de football en Cisjordanie, via le checkpoint d’Erez, Mahmoud a été arrêté par les soldats de l’occupation en juillet 2009. Malgré l’autorisation officielle qui lui était fournie par l’Autorité Palestinienne, les soldats ont estimé qu’il représentait une menace pour Israël, l’ont enfermé en prison pendant plus de trois ans sans accusation, ni procès, en vertu de la loi dite des « combattants illégitimes ».
Il est désormais libre depuis le 10 juillet, à l’issu d’une grève de la faim héroïque de plus de 90 jours. De nombreuses personnalités dont Eric Cantona, Lilian Thuram, Nicolas Anelka et certains joueurs de l’actuelle Equipe de France ont publiquement appelé à sa libération.
Par ailleurs, alors que les Jeux Olympiques viennent de se terminer célébrant les valeurs universelles de solidarité et de fraternité, deux autres footballeurs palestiniens - Omar Abu Rouis et Mohammed Nemer - sont détenus en détention administrative (donc sans charge) depuis février. Faut-il attendre qu'ils se mettent en grève de la faim pour réclamer leur liberté ?
De nombreux rapports démontrent que la politique d’occupation israélienne emprisonne la population palestinienne sous bien d’autres formes illégales, ayant un impact majeur sur le sport palestinien: les checkpoints et contrôles réguliers qui rendent très difficiles les rencontres sportives entre équipes des villes du nord et sud de la Cisjordanie (pourtant de taille comparable à celle d’un département français) tandis que le blocus imposé à la bande de Gaza interdit tout développement des infrastructures et comme c’est encore le cas pour Mahmoud Sarsak, toute sortie des talentueux sportifs Gazaouis pour aller représenter leur nation à l’étranger.
Ainsi toute personne de bonne conscience, soucieuse du respect des droits humains, favorable à un boycott politique de l’Euro 2012 afin de délégitimer le régime ukrainien pour son acharnement sur Mme Timochenko et les prisonniers politiques, devrait de facto exiger un boycott sportif de l’Euro 2013 des Espoirs contre Israël.
Ce pays ne respecte en rien les valeurs du sport. Il viole impunément les résolutions de l’ONU et le droit international depuis plus de soixante ans. Vous avez montré votre souci de ne pas vous contenter de simples condamnations des violations des droits humains, et de tenir au respect et à l’application du droit international. Votre question posée auprès de l’ancienne Ministre des Affaires Etrangères Michèle Alliot-Marie en février 2011 en témoigne. Vous souhaitiez connaitre les suites à donner au rapport Goldstone et à la position de la France quant à la soumission officielle de ce rapport au Conseil de sécurité de l’ONU en vue d'une éventuelle saisine de la Cour pénale internationale. Le déroulement normal de la compétition en Israël serait un manque de respect à la mémoire des 1400 morts dont 400 enfants, tués durant l’attaque israélienne contre Gaza de l’hiver 2008/2009.
Pour ces raisons, nous vous demandons, Madame le Ministre, de prendre clairement position au sujet de ce boycott sportif de l’Euro 2013, « au regard du respect des valeurs européennes ».
La plupart des Palestiniens considèrent la politique discriminatoire du gouvernement israélien comme un apartheid, de façon comparable, dans le fond, au régime sud-africain des années 1948 -1994. Il s’agit aussi du point de vue de plusieurs intellectuels et défenseurs des droits humains israéliens et aussi sud-africains. Un tribunal populaire des consciences, le Tribunal Russell sur la Palestine, composé et soutenu par d’éminentes personnalités, l’a également démontré. Ceci rend donc inévitable la question du boycott de l’événement.
En effet, dans les années 1980, l’ensemble de la communauté internationale a fini par rejeter la politique d’apartheid et le boycott sportif faisait consensus. Il suffit de relire l’allocution du Directeur Général de l’UNESCO à la Conférence internationale sur le boycottage de l’Afrique du Sud dans les sports pour s’en convaincre. Dans ce discours il rappelait la Résolution adoptée par le comité intergouvernemental pour l’Education Physique et le Sport.
Celle-ci invitait « les Etats et toutes les organisations intergouvernementales et non gouvernementales à entreprendre tous les efforts pour veiller au respect du principe olympique de non-discrimination, des principes condamnant l’apartheid formulés par l’ONU, et à ces fins, à prendre toutes les mesures de nature à décourager la participation de leurs ressortissants aux épreuves sportives organisées dans les pays pratiquant une politique d’apartheid, et aux rencontres sportives avec des personnes ou des équipes représentant ces pays ».
Et concluait : « Il s’agit ainsi de boycotter, non le sport mais le racisme. Précisément pour rendre au sport toute la noblesse de sa vocation. C’est pour œuvrer dans un tel sens que se tient votre Conférence. Et c’est pourquoi, au nom de nos espoirs communs, je vous souhaite le plus franc des succès. »
Dans l’attente de votre réponse, veuillez agréer, Madame le Ministre, l’expression de nos salutations les plus distinguées.
Campagne BDS France
La cessation des pratiques cruelles - telles que l’isolement carcéral (enfermement, depuis une dizaine d’année pour certains prisonniers, dans une cellule de 6m2 sans aucune interaction humaine) et la détention administrative (mesure qui permet à Israël sous prétexte de sécurité d’arrêter tout palestinien sans inculpation officielle, ni présentation devant un quelconque organe judiciaire, ni raison fournie aux proches) dont les conditions d’application violent de façon flagrante le droit international - faisaient également partie des revendications principales.
Un accord historique a été trouvé le 14 mai entre les autorités pénitentiaires israéliennes et les représentants des prisonniers, mais quinze jours après, celui-ci était déjà maintes fois violé par Israël qui, dans les faits, a renouvelé la détention administrative de plus de 25 prisonniers, n’a pas cessé la pratique d’isolement carcéral et a multiplié les violences et les humiliations à l’égard des prisonniers. A l’heure où nous vous écrivons, le mouvement ne s’est pas arrêté et quatre détenus sont en grève de la faim : Samer Al-Barq, Hassan Safadi, Ayman Sharawna, Samer al-Issawi.
Contrairement à ce qui se passe en Ukraine, l’aspect sportif et même footballistique était foncièrement présent dans ce mouvement généralisé de grève de la faim dans la mesure où parmi ces prisonniers se trouvait une vedette du football palestinien, membre de la sélection nationale, Mahmoud Sarsak. Vivant dans le camp de réfugiés de Rafah au sud de la Bande de Gaza, alors qu’il s’apprêtait à rejoindre l’Equipe de Palestine de football en Cisjordanie, via le checkpoint d’Erez, Mahmoud a été arrêté par les soldats de l’occupation en juillet 2009. Malgré l’autorisation officielle qui lui était fournie par l’Autorité Palestinienne, les soldats ont estimé qu’il représentait une menace pour Israël, l’ont enfermé en prison pendant plus de trois ans sans accusation, ni procès, en vertu de la loi dite des « combattants illégitimes ».
Il est désormais libre depuis le 10 juillet, à l’issu d’une grève de la faim héroïque de plus de 90 jours. De nombreuses personnalités dont Eric Cantona, Lilian Thuram, Nicolas Anelka et certains joueurs de l’actuelle Equipe de France ont publiquement appelé à sa libération.
Par ailleurs, alors que les Jeux Olympiques viennent de se terminer célébrant les valeurs universelles de solidarité et de fraternité, deux autres footballeurs palestiniens - Omar Abu Rouis et Mohammed Nemer - sont détenus en détention administrative (donc sans charge) depuis février. Faut-il attendre qu'ils se mettent en grève de la faim pour réclamer leur liberté ?
De nombreux rapports démontrent que la politique d’occupation israélienne emprisonne la population palestinienne sous bien d’autres formes illégales, ayant un impact majeur sur le sport palestinien: les checkpoints et contrôles réguliers qui rendent très difficiles les rencontres sportives entre équipes des villes du nord et sud de la Cisjordanie (pourtant de taille comparable à celle d’un département français) tandis que le blocus imposé à la bande de Gaza interdit tout développement des infrastructures et comme c’est encore le cas pour Mahmoud Sarsak, toute sortie des talentueux sportifs Gazaouis pour aller représenter leur nation à l’étranger.
Ainsi toute personne de bonne conscience, soucieuse du respect des droits humains, favorable à un boycott politique de l’Euro 2012 afin de délégitimer le régime ukrainien pour son acharnement sur Mme Timochenko et les prisonniers politiques, devrait de facto exiger un boycott sportif de l’Euro 2013 des Espoirs contre Israël.
Ce pays ne respecte en rien les valeurs du sport. Il viole impunément les résolutions de l’ONU et le droit international depuis plus de soixante ans. Vous avez montré votre souci de ne pas vous contenter de simples condamnations des violations des droits humains, et de tenir au respect et à l’application du droit international. Votre question posée auprès de l’ancienne Ministre des Affaires Etrangères Michèle Alliot-Marie en février 2011 en témoigne. Vous souhaitiez connaitre les suites à donner au rapport Goldstone et à la position de la France quant à la soumission officielle de ce rapport au Conseil de sécurité de l’ONU en vue d'une éventuelle saisine de la Cour pénale internationale. Le déroulement normal de la compétition en Israël serait un manque de respect à la mémoire des 1400 morts dont 400 enfants, tués durant l’attaque israélienne contre Gaza de l’hiver 2008/2009.
Pour ces raisons, nous vous demandons, Madame le Ministre, de prendre clairement position au sujet de ce boycott sportif de l’Euro 2013, « au regard du respect des valeurs européennes ».
La plupart des Palestiniens considèrent la politique discriminatoire du gouvernement israélien comme un apartheid, de façon comparable, dans le fond, au régime sud-africain des années 1948 -1994. Il s’agit aussi du point de vue de plusieurs intellectuels et défenseurs des droits humains israéliens et aussi sud-africains. Un tribunal populaire des consciences, le Tribunal Russell sur la Palestine, composé et soutenu par d’éminentes personnalités, l’a également démontré. Ceci rend donc inévitable la question du boycott de l’événement.
En effet, dans les années 1980, l’ensemble de la communauté internationale a fini par rejeter la politique d’apartheid et le boycott sportif faisait consensus. Il suffit de relire l’allocution du Directeur Général de l’UNESCO à la Conférence internationale sur le boycottage de l’Afrique du Sud dans les sports pour s’en convaincre. Dans ce discours il rappelait la Résolution adoptée par le comité intergouvernemental pour l’Education Physique et le Sport.
Celle-ci invitait « les Etats et toutes les organisations intergouvernementales et non gouvernementales à entreprendre tous les efforts pour veiller au respect du principe olympique de non-discrimination, des principes condamnant l’apartheid formulés par l’ONU, et à ces fins, à prendre toutes les mesures de nature à décourager la participation de leurs ressortissants aux épreuves sportives organisées dans les pays pratiquant une politique d’apartheid, et aux rencontres sportives avec des personnes ou des équipes représentant ces pays ».
Et concluait : « Il s’agit ainsi de boycotter, non le sport mais le racisme. Précisément pour rendre au sport toute la noblesse de sa vocation. C’est pour œuvrer dans un tel sens que se tient votre Conférence. Et c’est pourquoi, au nom de nos espoirs communs, je vous souhaite le plus franc des succès. »
Dans l’attente de votre réponse, veuillez agréer, Madame le Ministre, l’expression de nos salutations les plus distinguées.
Campagne BDS France